Retour du Tsar...

**Konstantin Ier** Nombre de messages : 68 Date d'inscription : 22/03/2011

Le dirigeable noordzeelandais l'avait déposé sur le quai de Gornograd, où rien n'était prévu pour l'accueillir. Après avoir chaleureusement remercié Willem et lui avoir encore répété ses engagements envers les Noordzeelandophones, le Tsar avait quitté la Capitale de Gorno pour Murasibirsk, à bord d'un train qui, malheureusement, n'était pas le train impérial, resté coincé en Edoran.

Arrivé quatre heures plus tard à Murasibirsk, le Tsar avait retrouvé la sécurité de la Garde Impériale et la robuste silhouette du Palais des Terems, masse médiévale et rassurante. Mais l'Imperator n'avait pas le temps de se reposer: des monceaux de télégrammes, de notes, de projets d'Oukazes, de circulaires et de messages l'attendaient sur son bureau. Des dizaines d'officiers se pressaient à sa porte; des conseillers d'Etat, des conseillers titulaires, des chefs de département remplissaient ses antichambres, sans oublier la masse de courtisans ineptes qui se bousculaient pour accomplir leur activité professionnelle: flatter.

- Préparez-moi une note à l'attention des gouverneurs... commença le Tsar, qui se massait délicatement les tempes, à l'attention du Conseiller Spechnev.

- Le gouverneur Krasnov demande s'il peut procéder à l'expropriation des Noordzeelandophones, répondit celui-ci.

- Comment ? Non, je veux sa démission à celui-là... Bien, cette note à l'attention des gouv...

Un officier entra, mal rasé, paniqué, un télégramme à la main:

- Le général Ioudenitch ! Il annonce que des aéroplanes edoranais ont violé notre espace aérien en Transvalachie. Il demande s'il peut riposter et envoyer un zeppelin lâcher quelques bombes au dessus de la ligne Chisinau.

- Hein ? Non, non ! Bon sang, songea le Tsar; ce n'était pas avec des badernes comme Ioudenitch que la paix allait être rétablie en Transvalachie... Sans parler de la Petite Russlavie.

Dans la pièce attenante, où avait été installée la Stavka, le téléphone sonnait sans arrêt, et les voix des officiers, des agents de liaison, des généraux et des bureaucrates composaient un brouhaha absolument insupportable.

Bring ! Bring ! Brin...
- Stepanov ?
- Non, Andreïev !
-.... Attentat à Novol...
- Colonel Bibesco à l'appareil !
Bring ! Bring !
- Voie coupée sur Mura'-Poursk, verste 123.
Bring !
- Stepanov ?
- le gouverneur Krasnov, de Kalingrad !
-... urgent, pour le Tsar...
Bring !
- Bondieu, quelqu'un peut m'avoir Stepanov ?
- C'est Ivanov, Vot'Haut'Noblesse, il appelle de Ryazan.
- Passez-moi Stepanov.
Bring !
- Un dénommé Sjemenov, de Nikan... de quelque part là-bas.
Bring !

Le Tsar s'affala quelques secondes sur son large fauteuil, massant ses temps douloureuses. Avait-il encore l'énergie pour faire face à cette crise ? La gabegie russlave... Pendant un instant, il regretta d'être revenu. Que les choses étaient plus simples à la Cour d'Allancia !

Le Premier Ministre se présenta enfin au Tsar qui avait été plus qu'occupé depuis son retour au Palais des Terems...
Il se rendait bien compte de l'effervescence chaotique qui régnait à cette heure au sein du palais... Il s'y était affronté ces derniers jours, dans l'attente du retour du Tsar. Les vieux mécanismes et les ressorts distendus de la Russlavie étaient bien durs à réparer...

- Majesté, la situation est complexe, nous voici face à deux mouvements de révolte tant en Transvalachie qu'en Petite Russlavie... L'intervention des deux empires en Transvalachie, je le crains, donnera une image de la Russlavie en tant que nation affaiblie et ne gérant plus ses affaires intérieures seules... Cela peut s'avérer dangereux! Edoran, passe, mais le Belondor!

Silence embarrassé face à un constat de débâcle: le Prince n'a pas réussi à mobiliser contre ces dissensions régionales...

- Quoi qu'il en soi, Tsar Imperator, je comprendrais que vous ne me renouveliez pas votre confiance en découvrant cette situation chaotique... Je suis à votre disposition et continue de servir votre politique et vos choix seront les meilleurs quoi qu'il arrive.

**Konstantin Ier** Nombre de messages : 68 Date d'inscription : 22/03/2011

Que répondre à Gornostaï ? La vérité, c'était que le Tsar était au bord du désespoir. Son autoritarisme, son arrogance bourrue n'étaient qu'un masque qui dissimulait les doutes et les craintes d'un vieil homme appelé au trône par une succession de révolutions et de carnages sanglants...

Son retour en Russlavie n'avait rien arrangé: depuis son arrivée en Gornograd, le Tsar voyait en chaque soldat un mutin, en chaque moujik un saboteur, en chaque ouvrier un terroriste. Des traîtres, des criminels, des alcooliques, des fous furieux ! Il s'en fallait d'un rien pour que ce pays plonge dans l'anarchie et le chaos... Car ce peuple avait le goût du sang ! Ce peuple aimait les violences absurdes, les cruautés gratuites ! C'était un peuple d'enfants sadiques qui jouait au bord de l'abîme, et c'était la tâche de l'Autocratie que de les empêcher de tomber... Mais Konstantin Alexandrovitch se sentait pris de doute et de fatigue: était-il encore en mesure d'empêcher ce maudit pays de sombrer dans la folie ? Il en doutait, et c'était ce qui expliquait l'autorisation donnée dans le feu de la panique à l'intervention étrangère en Transvalachie et en Petite Russlavie.

Mais le Tsar, si tant est qu'il pu trouver les mots pour exprimer cela, ne pouvait évidemment l'exprimer à haute voix devant son Ministre; il choisit d'éviter cette question embarrassante.

- Tu as réagis comme il le fallait dans cette situation, Miroslavytch. Le Tsar éclata d'un rire sans joie. Si je te retires ma confiance, où donc irais-je chercher ton remplaçant ? Parmi cette noblesse inepte qui ne pense qu'à jouir ? Parmi cette bourgeoisie qui parade ses scrupules libéraux au dessus du volcan ? Personne, tu m'entends Miroslavytch, personne ne voit ce gouffre... Il est pourtant là, sous nos pieds...

Gornostaï s'inclina devant le Tsar Imperator, le remerciant de sa confiance...

- Majesté, j'ai pu joindre les Guberniya d'Oudmourtie et d'Orient... La situation est plutôt calme dans l'Est de l'Empire, si ce n'est la présence jatonnaise dans le Kaukaze... Nous nous en occuperons d'ailleurs plus tard: la vengeance est un plat de sushis qui se mange très frais...

Silence

- J'ai fait donner des ordres pour que toutes les troupes mobilisables le soient et s'acheminent vers la petite Russlavie pour une part -environ 12000 soldats- et la Transvalachie d'autre part -environ 8000 soldats-. En espérant que cela puisse nous permettre de rétablir l'ordre!

Silence

- Par ailleurs un émissaire noordzeelandais, représentant un conglomérat de fabricants d'armes se propose de nous vendre à un tarif plutôt modiques des armes... Qui devaient d'ailleurs être utilisées contre nous... Je propose de lui acheter 10000 fusils, 500 mitrailleuses et 20000 pistolets au plus vite, les stocks sont apparemment prêts à être livrés...

**Konstantin Ier** Nombre de messages : 68 Date d'inscription : 22/03/2011

- Fais donc. Les événements récents ont prouvé que la restauration de l'Armée Impériale est loin d'être achevée. Nous en avons encore pour plusieurs années avant qu'elle ne retrouve la superbe qu'elle avait sous mon frère. Et dire que je voulais faire la guerre à Edoran !

Le Tsar se leva, et alla se poster devant la large fenêtre d'où l'on voyait le centre de Murasibirsk.

- Anissim, j'ai besoin de ton avis. Si Edoran écrase la révolte transvalaque, mon autorité sera rétablie, en apparence. Mais mon crédit, déjà au plus bas, ne s'en relèvera pas. Tout le Micromonde saura que l'Autocratie ne peut survivre que protégée par les baïonnettes étrangères.

C'est pourquoi je crois que la seule manière de sauver le prestige de la couronne..., c'est précisément d'éviter une victoire edoranaise en Transvalachie.

Le Tsar jeta un coup d'oeil au prince Gornostaï, qui, s'il était étonné par cette nouvelle idée impériale, le dissimulait admirablement bien.

- Voilà ce que je pense, Miroslavytch: nous devons obtenir pacifiquement la soumission des rebelles en leur octroyant un statut d'autonomie interne avant que les armées edoranaises n'écrasent la rébellion. Ainsi, le retour de la paix sera attribué à ma générosité et à mon pacifisme, plutôt qu'à la force brute de nos alliés.
Qu'en penses-tu, Miroslavytch ?

- Tsar de Toutes les Russlavies, Imperator: là sont tes titres, Majesté...

Voilà qu'Anissim Gornostaï utilisait le tutoiement envers le Tsar, Prince parmi les Princes... Le Prince Premier Ministre se réjouissait de la nouvelle qu'il venait d'apprendre: Konstantin relevait la tête! Voilà qui était digne de la Monarchie Samsonovite!

- Majesté, tu as tout à fait raison, et tout mon soutien!

**Konstantin Ier** Nombre de messages : 68 Date d'inscription : 22/03/2011

- Bien, bien. Le Tsar se redressa, content d'avoir trouvé quelque chose à faire et de sortir de cette posture de spectateur impuissant qui le vieillissait avant l'heure. Il nous reste à trouver l'homme idéal pour aller tâter le terrain auprès des rebelles transvalaques...

Anodine en apparence, cette tâche était en faite herculéenne, en partie à cause du Tsar lui-même, qui depuis le début de son règne ne s'entourait que de courtisans réactionnaires ou de militaires bornés. Pendant plus d'une heure, l'Imperator et le Prince passèrent en revue des dizaines de candidats potentiels.

Balabanov, Moussyguine, Soubotine, Andronikov, Sternberg, Palhen, Friedericks, Oulagaï-Chitchakov, Potocki, Karamzine, Langeron, Babenburg, Ioudenitch, etc...etc... Le Tsar écartait les uns après les autres tous ses fidèles, s'apercevant, à sa propre stupeur, qu'en fin de compte la coterie sur laquelle il s'appuyait pour gouverner était... totalement impropre à la moindre mission d'importance.

A bout de patience, le Tsar finit par s'exclamer:

- Ah, la peste ! Anissim, toi qui a de bonnes relations avec la partie éclairée (sic) de ma noblesse et les milieux d'affaires, je te charges de régler les détails de cette mission. Nommes l'homme que tu jugeras le plus à même de négocier avec ce... Boulkaniov, où vas-y toi même si tu le désires.

La situation était de plus en plus tendue, il n'était guère possible d'élaborer quelque stratégie que cela fût sans que la configuration du conflit changeât avant son application...

- Majesté, dès demain je prendrai le chemin de la Transvalachie... D'après nos dernières nouvelles un émissaire d'Ayale, une soi-disant monarchie du Continent Sud, a pris contact avec les rebelles transvalaques... Le prétexte était humanitaire, ce qui est déjà ridicule: comment une nation tierce se permet-elle de s'inviter dans une nation souveraine afin de s'immiscer dans des affaires purement internes? Mais cela ne s'arrête pas là, cette nation propsoe un traité de reconnaissance à la Transvalachie secessionniste... C'est tout bonnement insupportable

Slience pesant de la part des deux hommes...

- Majesté, il faut que Koutaïssov condamne et dénonce cela à l'OMF! Quant à moi je m'en vais donc négocier avec les rebelles...

**Konstantin Ier** Nombre de messages : 68 Date d'inscription : 22/03/2011

Décidément, le géant russlave s'avérait une proie tentante offerte à la malveillance innée des Etats jaloux de la grandeur slave... Ce qui, par ailleurs, entrait parfaitement dans la conception que le Tsar, comme beaucoup de ses sujets, avait du Micromonde en général: une vaste "Konspiratsyia" de forces obscures et perfides dirigée contre la Très Sainte, Très Cathodoxe et Très Autocratique Russlavie (cfr: M.I. Pankratov, "Cosmogonie politique", 1910, Presses Pankratov. G.K. Iakovlev, "La Russlavie des origines à nos jours; histoire d'une lutte perpétuelle pour l'existence", 1887, Kazan. W. De Bever, "Psychanalyse d'une géographie problématique: la Russlavie ou la guerre inévitable", 1903, Etudes Panslaves.)

- Je donnerais des instructions en ce sens. Hâte-toi, Miroslavytch ! Tu disposes de mon mandat plein et entier pour faire cesser les combats sur toute la ligne de front et négocier un accord avec les rebelles... Quant à cet Klausbourg qui est entré bien soudainement dans la partie en se réclamant de mon soutien... Cherche à savoir quelles sont ses véritables intentions.

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