Campagne électorale de mai 1917

Popes cathodoxe-orthodiques délibérant des candidats à soutenir durant la prochaine divine liturgie.

La situation politique russlave était des plus intéressantes. La Douma, largement dominée par les conservateurs, s’était résumée à faire office de chambre d’enregistrement et de refuge à godillots. La session actuelle n’avait pas brillé par son activité ni par son audace, se contentant tout au plus de mesurettes. Les nombreux deniers récoltés par la grande souscription nationale dormaient sagement dans les coffres de l’Etat, convoitise suprême pour le prochain budget. Ajournée durant les événements du coup d‘état manqué, l’assemblée s’était retrouvée impuissante. On vit pourtant de premières fractures dans les bancs du PIR : certains s’interrogèrent ouvertement sur les réactions du tsar – pourtant jugé relativement éclairé et libéral – tandis que d’autres se rangèrent derrière lui sans broncher.

Parmi les partis d’opposition, c’est naturellement le PCD qui prit au mieux avantage de la crise en soutenant les conjurés dès les premières heures. Certains députés se montrèrent même sur des barricades pour haranguer la foule devant les ambassades et établissements zollernois du pays. Il y a encore quelques mois, personne n’aurait pu parier que ce parti considérablement affaibli par la dernière guerre civile se relèverait de sitôt. Mais l’aile dite " raisonnable " avait pris contrôle du PCD, acceptant la réalité de la monarchie tout en appelant à de profondes réformes constitutionnelles et législatives pour amener vers un régime véritablement démocratique et parlementaire, et se réclamait héritière du mouvement des conjurés. On faisait déjà de l’appel du pied en direction d’Alexeï Karenine, lui demandant de se présenter dans sa circonscription natale.

Restait désormais à savoir si cette popularité soudaine se dégonflerait comme un ballon de baudruche derrière les rideaux de l’isoloir. Après tout, la paysannerie et la Russlavie des périphéries – encore majoritaires - restaient conservatrices sur bien des points. Une alliance de dernière minute avec le Parti Paysan pouvait se révéler bénéfique.

Conscient de la volatilité de la situation politique, le Ministère de l’Intérieur autorisa exceptionnellement les candidatures de dernière minute et l’inscription de formations habituellement interdites, comme le Parti Merksiste Luniniste, sur les listes électorales. A l’aube du vote, le pays retenait son souffle.

Le colonel Karénine avait pris un peu de repos ces derniers jours. Il avait profité de la levée de l'alerte puis de la mobilisation pour se retirer en banlieue de Murasibirsk dans la datcha du père de son épouse qu'il retapait depuis quelques temps déjà.

C'est là qu'un groupe d'officiers et de membres du PCD vinrent le trouver et lui parlèrent de la possibilité de se présenter aux élections générales. Ce n'est qu'en fin d'après midi, après un repas plus qu'arrosé que les visiteurs parvinrent à convaincre Karénine de tenter l'aventure.

Les permanents du siège du PCD purent donc annoncer, avec une joie a peine dissimulée, qu'Alexei Karénine était candidat du PCD dans l'une des circonscription de la capitale ou il avait son logement, non loin de l'une des casernes 'd'un des régiments ou il avait servi.

Il télégraphia par la même occasion sa décision à Olbrine et par politesse et égard au cabinet du Tsar afin de l'en informer.

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