LE VIGILANT, 18 août 1919

Sommaire:

- Un mois après l'attentat
- Justice et châtiment
- Et si ce n'était pas le Tsar qui était visé ? L'hypothèse du complot anti-moldavien
- Le Métropolite de Poursk décrète trois jours de jeûne et de prière supplémentaires
- Renversement du gouvernement et junte de Salut public


Leurs Majestés Impériales sont-elles encore en vie ?

Le mois dernier, l'impensable, l'abominable s'est produit. Le Souverain Autocrate Isopostole, notre Très Saint Tsar Mikhaïl Nikolaïevitch et son épouse l'admirable et vertueuse Impératrice ont été victimes d'un lâche, d'un odieux, d'un abominable crime impie qui a fait saigner le coeur de toute la Nation. Oh, pauvre race impériale des Samsonov, que de martyrs n'as-Tu pas souffert au service de ton peuple !

Depuis, aucune nouvelle n'a filtré, plus d'un mois après les faits, le peuple russlave ignore toujours dans quel état se trouvent Leurs Personnes Impériales. Une junte d'officiers hardis et dévoués, emmenés par le Colonel Comte Stroganov, patriote cathodoxe exemplaire, a balayé l'inepte gouvernement démocratique, ce que Le Vigilant ne peut que saluer, mais nul ne peut ignorer que, privée de son Souverain, la Russlavie titube dangereusement près du volcan. Les forces démoniaques, entretenues en sous-main par de sinistres conglomérats d'ennemis de la Russlavie, agitent leur mufle épais dans les profondeurs des quartiers ouvriers, des synagogues et des universités. Le moujik, affolé de chagrin, se plonge dans la débauche et la beuverie. Le bourgeois, inquiet et pusillanime, transfère ses avoirs sur des comptes zollernois ou krasslandais. Partout, ce n'est que peur, inquiétude, effroi, bestialité, et seules les églises où résonnent jours et nuits les prières au rétablissement de l'Oint du Seigneur offrent encore au patriote et au cathodoxe un asile de calme dans la tempête qui se lève sur la terre russlave.

Nous appelons, nous supplions la digne Junte du Colonel Comte Stroganov: Informez-nous ! Donnez-nous des nouvelles de Leurs Majestés ! Sont-elles encore en vie ?

Priap Kassianovitch Rioumine,
Rédacteur en chef


Justice ! Enquête ! Châtiment !

Nous appelons solennellement le nouveau gouvernement à faire la lumière sur l'odieux attentat contre la Personne du Souverain ! Que le député merksiste qui a osé dans sa folle témérité porter la main sur l'Imperator soit soumis à l'antique châtiment des régicides tel qu'il avait cours chez nos pères, en Murasovie ! Qu'il soit conduit au gibet de la honte ! Que l'on exhume les antiques instruments de la Tour des Douleurs ! Pinces, tenailles, feu, chiens, tout l'ancien arsenal des Tsars ! Qu'il souffre les mille morts que méritent les hérétiques et les blasphémateurs !

Mais, que le gouvernement ne croie pas qu'il suffise de mettre à mort le terroriste pour apaiser notre soif de justice ! Nous réclamons une enquête ! Que l'on diligente des juges ! Que l'on ouvre les secrets d'Etat à nos journalistes ! Que l'on révèle l'odieux complot dans toute son étendue, dans toute sa profondeur ! Le terroriste avait des complices: Qu'ils soient retrouvés, où qu'ils se cachent, à Novolensk, à Allancia ou au Valdisky ! Qu'ils soient saisis, capturés, et ramenés à Murasibirsk pour y connaitre le supplice rouge !

Pavel Isaakievitch Ostromourov
Juge à la retraite
Professeur de droit pénal à l'université de Kazan


Et si ce n'était pas le Tsar qui était visé ?

Selon certaines rumeurs, l'Impératrice-Tsarine était enceinte des oeuvres de son époux au moment de l'attentat. Si la chose est vraie, un tel enfant serait non seulement l'héritier de la Sainte Russlavie, mais disposerait également de droits légitimes sur le trône de Moldavia: ce royaume pourrait donc, à moyen terme, se détacher de l'orbe edoranaise pour entrer dans la grande famille slavo-russlave. Et si, comme le suggèrent certaines sources bien informées, ce n'était pas tant le Tsar Imperator qui était visé par cet odieux attentat, mais le Prince à naître, héritier de deux couronnes ? L'hypothèse est vertigineuse, effrayante dans son implacabilité: il serait alors facile de deviner qui, depuis la coulisse, a armé le bras du terroriste.

Nikolaï Mavrikievitch du Chayla,
Correspondant à Chisinau